21 millions d’IBK, un cadeau empoisonné à la presse malienne ?

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Le Président de la République, Ibrahim Boubacar Kéïta, a fait don de 21 millions à la presse privée à l’occasion de la fête du Tabaski. Pour le Président, cette somme servira aux journalistes de s’acheter le mouton pour la fête. Mais pour certains observateurs, ce don dégage une odeur d’achat de conscience en vu de la campagne électorale de 2018.

21 Millions de francs CFA [31 991,66 EUR], est le don du Président aux éditeurs de presse privée pour la fête de Tabaski. Cette somme selon nos informations, a été partagée entre cinquante journaux. La Maison de la presse à elle seule reçu cinq millions de francs CFA.  L’URTEL (union des radios et télévisions libres), par la voix de son Président, Bandiougou Danté, a admis avoir perçu cinq millions de francs CFA [7 617,06 EUR].

Mame Diarra Diop, présidente d’une association de presse en ligne, a confirmé avoir perçu l’argent pour l’ensemble de la presse en ligne. Mais les journaux qui « insultent » le pouvoir ont été exclus du don.

Pleins d’articles ont été écrit par certains journalistes sur la question pour indexer une tentative d’achat de conscience. C’est le cas du journaliste Mohamed Dagnoko du journal Le Combat  qui titrait : « Ces 21 millions qui dégage une odeur de magouille ».

Selon Jérôme Emilien Dravo, journaliste activiste pour la liberté de la presse,

«  Ce don octroyé à la presse malienne  peut avoir deux contextes à mon humble avis : d’une part le président de la République  par ce don peut avoir l’intension de corrompre les hommes de media qui occupent une grande place dans la consolidation de la paix et de la démocratie  d’un Etat. D’autre part,  il peut aussi avoir un sens social. Il signifie la cohésion sociale entre les fils d’un même pays et permet aux journalistes de supporter les coûts d’une telle célébration. La fête est aussi un moment de partage » Espérons que l’intention du Président soit le second contexte, conclut-il.

Une presse aux abois

Si la presse malienne accepte ce genre de cadeaux, c’est parce qu’elle est financièrement très vulnérable.  Selon le rapport de la CERCAP (Centre d’Etudes et de Renforcement des Capacités d’Analyse et de Plaidoyer) publié le 29 août 2017,  le Mali possède actuellement plus de 150 journaux, mais  la majorité d’entre eux ont des journalistes mal payés, n’ont pas de financement, de bureaux et matériels adéquats.

Sur la vingtaine d’organes pour lesquels le Centre a pu calculer les charges et les produits, 60 % sont déficitaires, c’est-à-dire que  leurs ventes ne couvrent pas les coûts salariaux. « Lorsque les salaires sont versés, ils varient entre 30 000 [environ 45 euros] et 75 000 F CFA [environ 114 euros] pour un départ. Un journaliste rémunéré mensuellement est payé par son employeur en moyenne  68 000 F CFA [environ 103 euros]. sur une échelle qui va de 38 000 [ environ 57 euros]  à 150 000 F CFA [ environ 228 euros], précise-t-il.

Difficile donc au Mali de parler de presse privée indépendante car la majorité des journaux suivent la ligne éditoriale qui arrange le pouvoir. Les journalistes ont été très souvent des « outils » des politiciens car il suffit de filer une enveloppe en douce à un journaliste pour qu’il écrive pour ou contre quelqu’un.

Pour pallier les difficultés auxquelles la presse écrite est confrontée au Mali, le Cercap propose la création d’un fonds d’aide à la presse qui aura pour objectifs d’augmenter la productivité des entreprises de presse, notamment par la réduction des coûts de production, l’adaptation des moyens et la recherche de la qualité, d’assurer la diffusion des publications auprès des nouvelles catégories de lecteurs notamment les jeunes et les femmes, d’améliorer et diversifier la forme rédactionnelle des publications en faisant recours aux nouvelles technologies de fabrication et de diffusion de l’information.

Lucrèce Aminata Kante

Source :TIA

 

 

 

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